5 leçons de sagesse massaï par Xavier Peron
L’inspirante sagesse massaï
Chercher et trouver sa cohérence intérieure, rester relié aux autres et à l’univers, c’est ce à quoi nous invite le peuple massaï. L’anthropologue Xavier Péron nous fait découvrir leur mode de vie dans son dernier livre, qui est aussi un ouvrage de développement personnel.
L’anthropologue a vécu pendant des années parmi la tribu Massaï : il a été initié à leurs rites et, depuis trente ans, il poursuit une relation spirituelle intense avec Kenny, son ami et guide massaï. « Chez eux, remarque-t-il, il n’existe ni philosophie ni dogme religieux ; ils vivent la réalité en faisant corps avec elle, tout en ayant conscience de ce qu’ils doivent apporter en tant qu’individus et membres d’une collectivité, pour maintenir l’équilibre et l’harmonie dans la grande chaîne de la vie. »
Selon lui, leur spiritualité peut se traduire par ces lignes de force : vaincre ses peurs, rester relié, ne pas créer de division en soi et autour de soi, tirer parti des épreuves, faire l’expérience de ce qui est.
« C’est ce que je m’efforce de pratiquer au quotidien et qui a changé ma vie, et c’est pour cela que je me sens leur passeur en Occident. Pour les hommes séparés, dispersés, agités que nous sommes devenus, il me semble important de diffuser leur message d’appel à l’unité intérieure, à l’ouverture de la conscience, deux ferments essentiels d’un vivre-ensemble plus juste et plus humain. » C’est cette voix que nous avons eu envie de faire entendre. Non pas pour idéaliser une culture ou un mode de vie, mais plutôt pour nous nourrir et nous inspirer. En découvrant les cinq piliers de la spiritualité massaï.
Les 5 leçons de la sagesse Massaï :
1. Ilmao : accepter la dualité
Le terme « massaï » provient du mot ilmao (« les jumeaux »), qui exprime la croyance selon laquelle toutes les choses sont reliées entre elles pour former des paires d’éléments complémentaires.
Comme dans le tao et sa figure du yin et du yang, les contraires existent, mais ils ne sont pas antagonistes. La dualité règne à l’extérieur, comme le jour et la nuit, la pluie et la sécheresse ; et à l’intérieur de soi où s’entrechoquent les élans altruistes et les désirs égoïstes, la peur et le courage… Refuser cette dualité est, pour les Massaïs, le meilleur moyen de souffrir et d’être en conflit avec les autres. D’où la nécessaire acceptation de la dualité du monde et des êtres. Une posture qui favorise la patience et la bienveillance.
EN PRATIQUE
Identifiez vos jumeaux intérieurs. Dressez la liste de vos qualités et comparez-les à un défaut et à des comportements qui ont pu vous conduire à des échecs ou à des conflits. Par exemple : « ordonné » peut aller de pair avec « rigide », ou encore la générosité peut aussi devenir attente de réciprocité et être source de désaccord lorsqu’elle reste à sens unique. Le but est de poser sur soi et sur les autres un regard nuancé et indulgent.
Mettez en adéquation vos mots et vos actes pour éviter les déséquilibres dans nos relations et notre rapport à nous-même, nos actes et mots doivent être jumeaux. Aucune différence entre le dire et le faire chez les Massaïs, qui savent par expérience que cette cohérence est la garantie de relations saines et durables.
2. Encipaï : être dans la joie
Pour les Massaïs, la joie n’est pas un but mais un point de départ. Elle est la manifestation du lien qui les unit à la déesse-mère, source de toute vie. La gratitude nourrit la joie, qui, à son tour, renforce le sentiment de gratitude : la gratitude d’être en vie, de pouvoir se nourrir, de pouvoir partager les épreuves et les réjouissances…
Partager et se réjouir ensemble, mettre en lumière ce qui va bien, faire preuve d’humour sont autant de pratiques qui entretiennent chaque jour la joie de vivre. Être dans la joie est également une forme de politesse que l’on doit aux autres, elle génère un confort relationnel dont chacun profite. D’ailleurs, les Massaïs ont l’habitude d’annoncer une mauvaise nouvelle en la « coinçant » entre deux bonnes. Cette formulation met du baume au cœur de celui qui la reçoit et allège le fardeau de celui qui la transmet.
EN PRATIQUE
Cultivez la gratitude au quotidien, en commençant par prendre conscience des dons, aussi minuscules soient-ils, que vous recevez. La porte que l’on vous tient, le sourire que l’on vous adresse, le repas que vous partagez… Donnez à votre tour, en conscience, du temps, des compliments, des conseils, toutes ces petites choses qui adoucissent et embellissent les journées de ceux qui vous entourent.
Positivez en « enserrant » une pensée ou un fait négatif entre deux idées positives, comme le font les Massaïs.
Reconnectez-vous à l’énergie de la nature. C’est elle qui nous fait nous sentir maillons de la grande chaîne du vivant. Rien de tel que de s’adosser à un arbre et de perdre son regard dans sa frondaison jusqu’à se sentir un avec lui pour retrouver sérénité et force intérieure. Deux éléments constitutifs du bonheur d’être.
3. Osina kishon : accueillir la « souffrance-don »
Sans souffrance, il n’y a pas d’éveil. C’est la conviction profonde des Massaïs qui voient, dans les épreuves envoyées par Enk’Aï, l’opportunité de grandir.
Un de leurs proverbes sacrés en témoigne : « La chair qui n’est pas douloureuse ne ressent rien. » Dans cette perspective, ils remercient la déesse-mère de placer l’épreuve-opportunité sur leur chemin. Leur rituel collectif consiste alors à « nouer son cœur » en faisant huit nœuds (représentant l’épreuve) sur une corde (le cœur), qu’ils vont dénouer (symbole de résolution des problèmes), montrant ainsi que, encore une fois, tout est duel et que l’on ne peut résoudre un problème qu’en le reconnaissant comme sien, puis en affrontant la difficulté afin de trouver la solution adéquate.
EN PRATIQUE
Procédez comme les Massaïs qui visualisent leurs émotions (peur, tristesse, colère, abattement, désir de vengeance…) après le rituel collectif de la corde, et les transportent vers leur cœur pour les brûler et les transformer en énergie, à la manière de l’alchimiste qui, dans son athanor, transforme le plomb en or.
Interrogez ensuite votre épreuve comme le Massaï qui parle à l’épreuve en ami. Que veux-tu me dire ? Quelle est ma responsabilité ? Dois-je attendre ou agir ? Quelle direction dois-je prendre ?
Notez toutes les réponses qui vous viennent spontanément sans les censurer ni les juger.
4. Eunoto : devenir un planteur
À la posture du constructeur, les Massaïs préfèrent celle du planteur. Alors que le premier se concentre uniquement sur la réalisation de l’objectif qu’il s’est fixé (la construction), le second plante son arbre, le soigne, mais accepte de faire avec ce qui lui échappe (le rythme de croissance, les aléas de la météo…). Concrètement, être planteur, c’est se mettre en phase avec le moment présent, s’adapter et se maintenir dans un état entre vigilance et confiance, volonté et humilité. Cette souplesse est facteur de sérénité, de patience et met à l’abri de la colère et de la déception.
EN PRATIQUE
Ancrez-vous, comme un arbre, dans le moment présent. Les Massaïs disent : « Le passé est un pays où je n’habite plus. » Ici et maintenant, que ressentez-vous ? Comment pouvez-vous composer au mieux avec la situation et les personnes présentes ? Que laisseriez-vous d’inutile et de pesant du passé ? Quelles projections anxieuses vous empêchent de goûter à la saveur du présent ?
Plantez un arbre, prenez soin d’une plante. Cela vous incitera à être, plutôt que de chercher à avoir.
5. Aingoru enkitoo : rechercher le bon ordre
Être dans la justesse – dans ses mots, dans ses actions –, cela signifie pour les Massaïs être reliés à Enk’Aï. Une posture qu’exprime l’expression « avoir le regard clair et la démarche alerte ». La clarté du regard signifiant que la cohérence intérieure se voit de l’extérieur, et la démarche alerte témoignant d’un sentiment de légèreté et de sécurité dû à la certitude de marcher sur son bon chemin. Troubles, conflits, agitation sont, en revanche, les signes que l’on s’est décentré et que l’on s’est éloigné de sa « mission ». Car, pour les Massaïs, être en quête du bon ordre, c’est aussi chercher ce que l’on est venu faire sur terre.
EN PRATIQUE
Écoutez les messages de votre corps lorsque vous avez fait un choix, ou que vous prenez une décision.S’ils sont justes, sous les émotions superficielles (appréhension, excitation), vous devez ressentir une vague de calme, une sensation de paix intérieure, qui peut se traduire en mots par « ce n’est pas facile, mais c’est juste ». En revanche, interrogez-vous si vous ressentez des tiraillements, de l’inconfort, de l’agitation mentale et physique, et que ces sensations durent ou se manifestent chaque fois que vous pensez à votre choix ou à votre décision.
Magnifique. Amour et gratitude. Vivre l’instant présent en restant ancré.